Mille sources à alimenter et auxquelles s’alimenter, qu’on soit d’ici ou d’ailleurs…»
Gatti, la première fois, pour moi, ce fut à Gentioux pour une lecture. Je ne le connaissais pas, une affiche de quelque part, je ne sais plus où. Son nom ne me disait rien. Ce qui m’a décidé ? La référence à la Résistance, ici sur le plateau. Une fidélité présente, vivante à mon arrière grand-père, boucher, marchand de bestiaux, membre de l’Armée secrète, “un légal”, qui ravitaillait le maquis. Et ma grand-mère, qui jeune fille, filait à bicyclette par les chemins avec des messages. Et tout au fond une empreinte, le refus de l’ordre établi.
La rencontre, la vraie, ce fut quelques mois plus tard, à la Berbeyrolle, la lecture du poème à Guingouin, le rebelle. La force et l’énergie de Gatti, de ses mots. Soulèvement. Ce jour là j’ai appris qu’il y avait recherche d’un lieu de culture, de création mais autrement que culture-spectacle, trois petits tours et puis s’en vont. En tant qu’élu l’intuition d’une véritable opportunité, ici sur le plateau. Une manière, une nécessité de lier passé, présent et avenir. Et puis, ily eut la rencontre avec Hélène Châtelain et la conjonction d’un désir de regarder les étoiles. Plus tard, quand je me suis approché plus encore de Gatti, j’ai compris vraiment, senti, ce que pouvait signifier cette expression “d’une deuxième naissance” dans le trou du maquis. Et aujourd’hui ce désir de venir ici, près de la forêt, histoire de boucler la boucle… mais pour mieux l’ouvrir à nouveau, avec d’autres. Et j’en suis. Et je ne veux pas le décevoir. Un retour aux sources. S’emboîtant avec tous les sédiments du plateau. Refuge des bandits de grands chemins au Moyen âge, des mutins de la Courtine, des maquis pendant la Résistance, des appelés, qui à La Villedieu refusèrent de partir faire la guerre coloniale en Algérie. Au moment même où ici, s’installent, convergent, des collectifs ou des individus “pour vivre autrement”. Et pas seulement en mots mais concrètement, en expérimentant, en
inventant, en vivant. Alors, oui, ici sur le plateau, un refuge des résistances Armand Gatti. Un lieu, un foyer de rencontres où la culture, l’art, le langage, les langages, la globalité, la bio-diversité, ne seront pas que des mots mais autant de sources, mille sources à alimenter et auxquelles s’alimenter, qu’on soit d’ici ou d’ailleurs…
Pierre Coutaud,
Propos recueillis par Manée Teyssandier, Tulle, décembre 2007.
Pierre Coutaud est le maire de Peyrelevade,
27 janvier 2008 : Naissance officielle du « Refuge »
Réunion de constitution de l’association « Refuge des résistances Armand Gatti » au Monde allant vers, à Eymoutiers.
« Cette association a pour objet de résister à la société spectaculaire et marchande en faisant vivre sur et à partir du plateau de Millevaches, des lieux ou des moments ouverts de formations, réflexions, créations, recherches, rencontres internationales, dans le prolongement de l’esprit de résistance et des questionnements portés par et avec Armand Gatti dans et autour de son œuvre. »
(Article 2 des statuts)
5 avril 2008 : Lecture par Gatti de Docks à l’Espace Rebeyrolle, à Eymoutiers – devant le tableau du Cyclope.